Médecine et constructivisme : vers des liaisons heureuses (Part II)

mercredi 13 février 2013 à 12:37

J'ai choisi, pour illustrer l'article ci-dessous, écrit par Raphaël Arditti, les photos de personnes dont les travaux ont permis de fonder le Constructivisme ou d'en alimenter le développement.
Il s'agit d'un nouvel extrait d'une liste d'auteurs incontournables sans qui la Méthode Lafay n'aurait pu voir le jour. Ces personnes m'ont permis de penser, élaborer et affiner la méthode.
D'autres références illustrent des articles précédemment publiés sur ce blog, vous les trouverez en section "Philosophie".

Place maintenant à l'article de Raphaël (la première partie de l'article est disponible en cliquant ICI).


Bonjour,

En tant qu’étudiant en médecine et pratiquant de la Méthode Lafay, j’aimerais montrer dans cet article comment les savoirs qui structurent la Méthode Lafay peuvent être selon moi transférés au domaine médical. En quoi le Constructivisme permet-il de repenser la formation des médecins, et comment ces derniers, une fois formés, soigneront-ils leurs patients ?
Comme nous le verrons, la prise en compte du contexte s’avèrera déterminante dans le but de proposer un enseignement ainsi que des soins de qualité.

Francisco Varela
 photo franciscoVarela_zpsad817bcd.jpg

I. L’enseignement de la médecine : acquérir des compétences

Dans le cadre des études médicales, prendre en compte le contexte revient à porter son attention sur la situation des étudiants auxquels on s’adresse. Quelles sont leurs attentes, leurs contraintes, leurs ressources ?

On peut penser que ceux-ci cherchent avant tout à acquérir des compétences dans le but d’exercer un métier et donc un rôle dans la société. Dans cette perspective, la formation se trouve subordonnée à la pratique clinique. Plutôt que de viser une connaissance exhaustive du corps humain (anatomie, physiologie, embryologie etc.), elle doit travailler à sélectionner, dans les divers champs de savoirs constitués (sciences dures, sciences humaines), les informations à même de permettre une prise en charge globale du patient.

Une fois ce tri opéré, on se trouve en possession d’une masse de connaissance, certes réduite, mais désordonnée. La prise en compte du niveau de nos étudiants devrait nous permettre de dégager un point de départ : en prenant garde à ne pas commencer trop « haut », mais bien plutôt à débuter à un niveau qu’ils seront en mesure de maîtriser, nous favorisons leur sentiment de contrôle, leur motivation et donc leur réussite. Enfin, à présent que nous sommes en possession d’un point de départ et d’un point d’arrivée (objectif), il s’avèrera nécessaire d’élaborer de multiples étapes intermédiaires, afin d’amener sans encombre l’étudiant à destination.

Andrée Piecq
 photo AndreacuteePiecq_zps4c9dd87c.jpg

Une fois le volet théorique achevé, on peut se demander comment l’articuler avec la pratique de terrain. Afin que les deux se conjuguent et s’interpénètrent au mieux, il est préférable de créer un va-et-vient permanent entre eux, plutôt que d’enseigner toute la théorie avant de passer à la pratique.
Dans ce but, on transmettra au départ des informations d’ordre général, qui devront permettre à l’étudiant de se diriger avec un minimum d’assurance vers la pratique. Puis, la confrontation aux situations de terrain créera d’elle-même le besoin de collecter de nouveaux savoirs. L’étudiant pourra alors se tourner vers les connaissances théoriques organisées précédemment par l’enseignant afin de nourrir sa propre pratique. Ces pérégrinations incessantes permettront aux connaissances théoriques de diffuser et de se sédimenter progressivement dans l’esprit de l’étudiant, sans que celui-ci cherche à forcer leur acquisition.

John Weakland
 photo JohnWeakland_zpsc48f3cb9.jpg


II. La pratique de la médecine : une prise en charge globale

La prise en compte des contextes psychologiques et sociologiques dans lesquels survient la maladie amène le médecin à reconsidérer profondément la prise en charge de ses patients, notamment en prêtant une attention soutenue à la communication qu’il peut entretenir avec eux.
En effet, lorsqu’une maladie survient (phénomène biologique), elle se présente alors comme un élément potentiellement intégrable à notre histoire personnelle. Notre identité peut être en partie comprise comme un récit, où divers évènements ont été sélectionnés puis ordonnés chronologiquement, par nous ainsi que par notre entourage, dans le but de produire une cohérence à même de donner un sens à notre vie.
Ce récit, en fonction de ce qu’il raconte de nous, peut, à des degrés divers, rentrer en conflit avec l’événement « maladie ». Une personne se définissant comme une « battante », qui dans son histoire personnelle met surtout en avant les situations où elle est sortie victorieuse de nombreux combats, rencontrera probablement des difficultés à intégrer dans son récit l’annonce d’un grave cancer, dans le cas où celui-ci symboliserait pour elle une perte de contrôle.

Jean-Jacques Wittezaele
 photo Jean-JacquesWittezaele_zpsdef2cf95.jpg

Dans ce contexte, il semblerait que la relation thérapeutique ait pour premier objectif la réappropriation par le patient de sa maladie, la réintégration de celle-ci dans son récit personnel. Dans ce cadre, le praticien doit s’attacher à comprendre comment son interlocuteur considère le monde, les autres et sa propre personne. En utilisant son propre langage, en pénétrant dans son univers, il peut ainsi l’accompagner dans la construction d’une nouvelle cohérence, d’un nouveau récit de vie.

Les avantages d’une telle attitude vont se manifester à de multiples niveaux, notamment en permettant une relation de qualité entre le médecin et son patient, ainsi qu’entre le patient et lui-même.
En effet, la sensation d’évoluer dans un univers qui lui est familier amène le patient à davantage d’ouverture et de confiance, contribuant ainsi à l’instauration d’un réel confort psychologique propice à la guérison.

Se réapproprier la maladie permet également au patient de consolider son identité, de l’unifier. Un tel événement peut être en effet très déstabilisant car il n’est pas facile d’être dans le déni perpétuel : les défaillances du corps se manifestent régulièrement à la conscience, non seulement par les symptômes, mais également par l’attitude des proches ainsi que par les structures de prise en charge (hôpitaux, cliniques, maisons de soin etc.). Ces fréquentes perturbations mettent régulièrement en danger la cohérence et l’identité de la personne qui doit par conséquent lutter contre les autres et contre elle-même afin de préserver son récit.
A présent que la maladie fait partie de son histoire personnelle, elle n’est pas plus un élément extérieur qui lui échapperait : le patient se sent davantage capable d’exercer un pouvoir sur elle et il prend alors une place beaucoup plus active dans sa propre prise en charge.

Steve de Shazer
 photo StevedeShazer_zpsaa4ad5fb.jpg

Envisager les interactions entre les niveaux biologiques, psychologiques et sociologiques de l’individu peut ainsi nous permettre de conditionner au mieux la situation, en créant un esprit d’optimisme et d’enthousiasme chez le patient. Mais on peut également, sur le plan purement biologique, s’appuyer sur les organes qui interagissent avec l’organe lésé afin de mieux le soigner.
Deux exemples illustreront cette démarche.
En ostéopathie, on considère que les troubles affectant les organes profonds se répercutent sur les structures mécaniques : os, muscles, tendons, fascias etc. Ainsi, en soulageant ces structures directement accessibles par l’ostéopathe, on peut induire en retour un effet bénéfique sur les organes profonds. On fait alors l‘économie d’examens et de traitements à la fois coûteux et non dénués d’effets secondaires.
Il y a quelques mois, des chercheurs ont établis un lien entre l’activité de notre flore intestinale (1015 bactéries) et le fonctionnement de notre cerveau. On peut penser que cette découverte est potentiellement riche de promesses en ce qui concerne le traitement des pathologies cérébrales. En effet, le cerveau est un organe particulièrement bien isolé des vaisseaux sanguins, de par l’existence d’une barrière dite hémato-encéphalique.
Plutôt que de chercher à forcer cette barrière, pourquoi ne pas tenter d’atteindre le cerveau « de biais », en modifiant le fonctionnement de la flore intestinale dans le but de remédier au dysfonctionnement cérébral ?

Gregory Bateson
 photo AVT_Gregory-Bateson_511_zps69169c4e.jpeg

Dans cette partie, nous avons vu comment la prise en compte du contexte (système) nous permettait de mieux prendre en charge un dysfonctionnement qu’on pourrait à tort considérer comme purement localisé au plan biologique. Mais la prise en compte du contexte ne permet pas seulement de contourner plus aisément les obstacles (maladies) qui se dressent sur le chemin de la santé. On peut également l’utiliser afin de réduire fortement la probabilité d’apparition de tels obstacles : ainsi, en maîtrisant son alimentation, en pratiquant une activité physique régulière, en cherchant à réduire son exposition aux toxiques et au stress, dans la mesure de ses ressources et de ses possibilités, on produit un contexte favorable à l’épanouissement de son organisme.

Richard Fisch
 photo RichardFisch_zps8d2a3e2c.jpg


Conclusion

En nous invitant à contextualiser nos actions, le constructivisme nous permet non seulement de mieux les orienter, par la création d’un objectif, mais il nous permet également d’identifier de multiples chemins pour y accéder. Si tout est lié, alors il existe de nombreux détours pour parvenir en un point du système et l’attaque frontale n’est plus l’unique solution. Ainsi, de même qu’il est possible de faire progresser les dips en bloquant momentanément cet exercice afin de se focaliser sur le reste de la triade, on peut également atteindre le cerveau en passant par le tube digestif, le corps par l’esprit, la théorie par la pratique. Cette multiplication de chemins possibles nous rend plus libre : notre éventail de choix est considérablement élargi et nous permet, dans chaque situation, de repérer puis d’emprunter un chemin de moindre résistance.

« Cultiver l’efficience en vous cultivant » (Olivier Lafay)


Posté dans Philosophie
Olivier Lafay

Commentaires

  1. Article intéressant.

    D'ailleurs, je pense avoir un rapport proche de celui la avec mon médecin......c'est peut être pour ça que je ne suis quasi jamais malade.

    En ce qui concerne l'ostéopathie, j'émets quelques réserves.
    Et, l'idée d'atteindre le cerveau "de biais" via les bactéries..... me semble ...intéressant, certes, mais difficilement réalisable.
    Car autant, le cerveau SAIS quel chemin utilisé pour agir sur les bactéries, autant nous ne savons pas par quel chemin agir sur les bactéries peut agir sur le cerveau..... Ca me semble donc une pure vue de l'esprit poru moi.

    Ensuite, concernant l'enseignement, oui pourquoi pas, mais "Ces pérégrinations incessantes permettront aux connaissances théoriques de diffuser et de se sédimenter progressivement dans l’esprit de l’étudiant, sans que celui-ci cherche à forcer leur acquisition" , prendraient combien de temps ?

    "Atteindre le cerveau par les organes", est une vision très orientale de la chose je trouve.

  2. je dis bravo à Raphael, très bel exposé. Ca fait plaisir de voir des étudiants en medecine préoccupés par le bien être psychologique des patients. A mon goût, trop de praticiens sont d'abords medecin avant d'être humain... Les relations se limitent souvent a maladie/traitement/rémuneration.

  3. Enfin :) cet article qu'en tant qu'étudiant en médecine j'attendais avec impatience.
    Il est clair qu'aujourd'hui notre formation reste trop "à l'ancienne" à mes yeux ; cours magistraux pas adaptés au niveau des étudiants (ce qui, comme tu le soulignes, est crucial), stages parfois mal encadrés, délaissés...

    Il est intéressant de constater qu'en Suède, où les étudiants en médecine sont épanouis et réussissent brillamment leurs études (et j'entends par là bien plus qu'une simple réussite scolaire), la formation se déroule exactement comme tu le décris :

    Très tôt, après seulement 2 années d'enseignements très généraux, les étudiants sont affectés en stage pour un temps très important, environ 80% de leur temps consacré à leur formation, ce qui est énorme comparé à ce qui se fait chez nous.
    Seulement, comme tu l'expliques, l'étudiant est autonomisé, va rechercher lui même l'information dont il a besoin, après avoir été confronté à une pathologie ou un patient particulier, ou alors l'apprends directement par le biais de ses Maîtres, via le compagnonnage.

    Quel dommage que ce soit pas le cas chez nous. Nous arriverons probablement aux mêmes résultats, car beaucoup savent que la médecine française est une référence, mais au prix de quels efforts ? De quels sacrifices ? Au bout de combien de temps ?...


    Sinon, je n'ai pas bien compris ce passage :

    "Plutôt que de viser une connaissance exhaustive du corps humain (anatomie, physiologie, embryologie etc.), elle doit travailler à sélectionner, dans les divers champs de savoirs constitués (sciences dures, sciences humaines), les informations à même de permettre une prise en charge globale du patient."

    Quelle approche conseilles-tu ?

    En tout cas merci pour ces éclaircissements, ces rappels sur le sentiment de contrôle. Je suis certain que, même si l'organisation qui nous entoure n'est pas toujours parfaite, ils peuvent permettre d'en tirer le meilleur et de réussir, malgré tout, à être le plus efficient possible.

  4. Oui, mais j'ai une réservé à formuler :
    Réussir à faire le lien avec l'histoire du patient et sa maladie, demande nécessairement du temps.

    Autant mon médecin, le prends le temps.
    Autant, ce n'est pas valable partout, d'ailleurs, je pense que je vais perdre gros quand il arrêtera.....:/

    Ensuite, la relation que j'ai avec mon médecin s'est faite avec le temps, il me semble illusoire de vouloir monter une relation comme l'énonce Raphael en quelques consultations, ce qui implique donc, soit de ne pas compter ces heures, soit d'avoir d'être (très) doué en psychologie/bon sens, et pas seulement en médecine.

  5. Raphaël Arditti a écrit:

    Oui aurel je suis assez d'accord avec toi. Pour moi, la relation qui se noue entre un médecin et son patient est similaire à celle qui relie un mécanicien automobile et une voiture. On fait subir une batterie de test à la "machine", afin de déterminer à quel endroit est-ce que ça coince, et dans un second temps réparer le véhicule.
    Ce qui intéresse le médecin, ce n'est donc pas ton identité, mais la maladie dont tu es porteur. La question qui se pose alors, est de savoir si cette réduction du patient à des troubles biologiques ne peut pas être un obstacle à la guérison (ou du moins la ralentir fortement)...

    Thomas, ce que je voulais dire, c'est que l'on a trop tendance à vouloir enseigner le maximum de choses sur le corps humain, en perdant un peu de vue que le but reste avant tout de soigner des gens. Ainsi, connaître précisément le développement embryologique du rein ou bien les insertions de la totalité des muscles de la main, est bien souvent de peu d'utilité aux médecins généralistes. Si les études médicales sont longues et difficiles, c'est parce qu'avant tout le tri n'est pas fait dans les connaissances à enseigner, ou plutôt il n'est pas fait consciemment (car on ne peut jamais tout embrasser).

    Batigole, je suis d'accord avec ton dernier post. Ce que j'ai dit sur la nécessité de prendre en compte le vécu est encore un peu vague, mais je m'attelle à préciser cet aspect des choses :-)
    Concernant la communication bactéries intestinales/cerveau, il est vrai que nous n'en savons pas assez actuellement, mais à partir du moment où nous comprendrons le 'jeu" qu'ils jouent ensemble, pourquoi ne pourrions-nous pas y intervenir ?

    En tous cas, merci à tous les 3 pour vos commentaires, et à Olivier pour la publication de mon article (assortis de nouveaux auteurs :-)

  6. Très bon article, on reconnaît bien là les inspirations qui motivent la construction de cette réflexion.

    Il semblerait que la voie que l'article veuille préconiser, est celle de la prévention. J'ai pourtant ressenti comme une retenue, comme si l'auteur ne voulait pas énoncer cette solution. Peut-être est-ce une mauvaise interprétation.

    J'apprécie beaucoup cette manière d'aborder la médecine, qui fait plus penser aux médecines orientales qu'occidentales.

    Va t-on enfin arrêter de soigner les symptômes et non la maladie, qui serait alors considérée comme une mauvaise relation avec notre environnement (exposition aux produits toxiques, dont médicaments, hygiène de vie, etc...) ? Les médicaments vont-ils continué d'être de plus en plus commercialisé ? Quand on voit tout ce qu'on peut acheter librement, on voit bien que c'est du pur business...


    @Thomas C : je me demande bien pour qui la médecine française est une référence.
    Un cours magistral c'est comme ouvrir un livre, avec la possibilité de passer à côté de certains points, et l'impossibilité d'y revenir... Parfois on se demande si certains médecins ne sont pas "qu'une mémoire" de leurs études...sans réflexion derrière, malgré les recherches constantes, et les nouvelles publications d'études.





  7. Raphaël Arditti a écrit:

    Important : c'est assez difficile pour moi de vous répondre, car je suis tiraillé entre l'envie de développer longuement mes réponses, et la crainte de barber les lecteurs (ainsi que le fait que cela reste très coûteux pour moi en terme de temps).
    Je donne donc quelques pistes de réflexion, mais si cela vous semble imprécis ou incomplet et que vous désireriez en savoir davantage, n'hésitez surtout pas à me relancer ! J'essaierais de creuser davantage la question :-)

  8. Raphaël Arditti a écrit:

    Thomas a écrit : "Plutôt que de viser une connaissance exhaustive du corps humain (anatomie, physiologie, embryologie etc.), elle doit travailler à sélectionner, dans les divers champs de savoirs constitués (sciences dures, sciences humaines), les informations à même de permettre une prise en charge globale du patient."

    Quelle approche conseilles-tu ?"

    Je développe un peu ma réponse :-)
    Aujourd'hui, le médecin a tendance à considérer son patient comme une voiture à réparer. Mais une des différences qui me semble importante, entre nous et les machines, c'est notre capacité à ressentir des émotions. Or, certains auteurs ont montré que celles-ci avaient un impact sur le fonctionnement du corps (par exemple, le stress inactiverait partiellement le système immunitaire).

    Je pense que la composante émotionnelle varie en fonction des individus et qu'elle est donc liée à l'identité ainsi qu'à la vision du monde de chacun. Il faudrait donc que le médecin communique avec son patient d'une certaine façon, dans le but de produire des émotions positives à même de faciliter la guérison (comment précisément, je ne sais pas encore :-D

    PS : sur la page Wikipedia de Steve de Shazer (cf. plus haut), j'ai noté que celui-ci avait écrit l'article suivant : "La construction des émotions : Le langage des sentiments dans les thérapies brèves centrées sur la solution des problèmes". Ca me semble tout à fait lié au sujet :-)

  9. Tu es en quelle année de médecine Raphaël?

  10. Raphaël Arditti a écrit:

    Je t'avoue que je préfèrerais discuter avec toi du contenu de l'article... qu'en avez-vous pensé cher confrère ? ;-)

  11. Salut,

    disons que je l'ai trouvé intéressant, mais que je suis en profond désaccord avec toi sur de nombreux points. C'était là tout le sens de ma question, savoir en quelle année tu es m'aurait permis de comprendre le contexte dans lequel tu as écrit l'article.
    Il n'a en effet pas la même signification s'il est écrit par un P2/D1 (voire P1) que par un externe/interne.
    Si tu acceptes de me répondre, on pourra en discuter, ça serait avec plaisir.

  12. Olivier Lafay a écrit:

    Ce serait intéressant que tu listes ces points, Krabin.
  13. Ok, mais j'aurais bien aimé avoir une réponse de Raphaël, pour connaitre un peu mieux le contexte de cet article.


    [Comme nous le verrons, la prise en compte du contexte s’avèrera déterminante dans le but de proposer un enseignement ainsi que des soins de qualité.]

    Tout à fait d'accord


    [On peut penser que ceux-ci cherchent avant tout à acquérir des compétences dans le but d’exercer un métier et donc un rôle dans la société.]

    Oui, et c'est heureux! Quelle société peut donc se passer de médecins?


    [Dans cette perspective, la formation se trouve subordonnée à la pratique clinique. Plutôt que de viser une connaissance exhaustive du corps humain (anatomie, physiologie, embryologie etc.), elle doit travailler à sélectionner, dans les divers champs de savoirs constitués (sciences dures, sciences humaines), les informations à même de permettre une prise en charge globale du patient.]

    Les deux sont complémentaires! Un docteur en sociologie ne va pas soigner ta hanche ou ta péricardite. Et ces matières fondamentales (anat, etc) ne sont que le b-a ba, leur connaissance parfaite est indispensable à ta progression. c'est le niveau 1 de la méthode si tu veux. Les sciences humaines, on en fait un peu en première et en 2° année, mais ça ne sert pour ainsi dire à rien, comparé à ce que l'on apprend au contact des patients pendant les stages. A mon sens, on devrait plutôt se concentrer davantage sur l'anat, la physio, l'embryo, etc pendant le premier cycle, et ne pas perdre du temps à faire de la socio et de la psycho. ça s'apprend sur le terrain, au contact des gens, pas dans les livres. Et ceux que ça intéressent peuvent tout à fait s'y consacrer d'eux mêmes.


    [Une fois ce tri opéré, on se trouve en possession d’une masse de connaissance, certes réduite, mais désordonnée.]

    Non!!! Tu fais un mauvais tri, et tu ne prends pas la peine d'ordonner. La masse de connaissances est considérable, et ordonnée. C'est un puzzle, on trouve des pièces au fur et à mesure des années. Cela parait désordonné au début, mais en avançant, on fait le lien entre tout cela. L'histologie te permet de comprendre l'anat et la sémio, la physio te permet de mieux retenir l'histologie, etc...

    [La prise en compte du niveau de nos étudiants devrait nous permettre de dégager un point de départ : en prenant garde à ne pas commencer trop « haut », mais bien plutôt à débuter à un niveau qu’ils seront en mesure de maîtriser, nous favorisons leur sentiment de contrôle, leur motivation et donc leur réussite.]

    C'est déjà le cas, l'acquisition des connaissances est tout à fait progressive.



    [Une fois le volet théorique achevé, on peut se demander comment l’articuler avec la pratique de terrain. Afin que les deux se conjuguent et s’interpénètrent au mieux, il est préférable de créer un va-et-vient permanent entre eux, plutôt que d’enseigner toute la théorie avant de passer à la pratique. [….] Ces pérégrinations incessantes permettront aux connaissances théoriques de diffuser et de se sédimenter progressivement dans l’esprit de l’étudiant, sans que celui-ci cherche à forcer leur acquisition.]

    C'est aussi déjà le cas ! On acquière une base théorique (assez limitée) pendant la P2-D1, et, pendant l'externat (4°,5°, 6° années), on se retrouve, le matin, en stage, et l'après midi, en cours. Tu as donc ton va-et-vient !



    [Une personne se définissant comme une « battante », qui dans son histoire personnelle met surtout en avant les situations où elle est sortie victorieuse de nombreux combats, rencontrera probablement des difficultés à intégrer dans son récit l’annonce d’un grave cancer, dans le cas où celui-ci symboliserait pour elle une perte de contrôle.]

    T'as pas dû passer en cancéro...




    [A présent que la maladie fait partie de son histoire personnelle, elle n’est pas plus un élément extérieur qui lui échapperait : le patient se sent davantage capable d’exercer un pouvoir sur elle et il prend alors une place beaucoup plus active dans sa propre prise en charge.]

    Je suis d'accord


    [Envisager les interactions entre les niveaux biologiques, psychologiques et sociologiques de l’individu peut ainsi nous permettre de conditionner au mieux la situation, en créant un esprit d’optimisme et d’enthousiasme chez le patient. Mais on peut également, sur le plan purement biologique, s’appuyer sur les organes qui interagissent avec l’organe lésé afin de mieux le soigner.
    Deux exemples illustreront cette démarche.
    En ostéopathie, on considère que les troubles affectant les organes profonds se répercutent sur les structures mécaniques : os, muscles, tendons, fascias etc. Ainsi, en soulageant ces structures directement accessibles par l’ostéopathe, on peut induire en retour un effet bénéfique sur les organes profonds. On fait alors l‘économie d’examens et de traitements à la fois coûteux et non dénués d’effets secondaires.]

    Oui, mais faut pas pousser, l'ostéopathie, c'est bien, mais ça ne s'applique qu'à peu de choses. Et il ne faut pas oublier que la grande majorité des ostéos n'ont pas fait médecine avant, et qu'ils sont tout à fait incapables, devant certains signaux d'alarme, de rediriger un patient vers quelqu'un de plus compétent. Et on est beaucoup plus sur le versant symptomatique que curatif du soin. Donc l'ostéo oui, mais pas avec n'importe qui, et pas pour n'importe quoi.





    [Il y a quelques mois, des chercheurs ont établis un lien entre l’activité de notre flore intestinale (1015 bactéries) et le fonctionnement de notre cerveau.]

    Oui, et je pense que nous ne sommes pas au bout de nos surprises dans ce domaine !

    [barrière dite hémato-encéphalique. Plutôt que de chercher à forcer cette barrière à coup de doses massives de médicaments, pourquoi ne pas tenter d’atteindre le cerveau « de biais », en modifiant le fonctionnement de la flore intestinale dans le but de remédier au dysfonctionnement cérébral ?]

    Pas d'accord du tout. Tu ne forces rien du tout avec des doses massives de médocs, si ta BHE est intacte, passera ce qui doit passer. Pas le reste.



    [ainsi, en maîtrisant son alimentation, en pratiquant une activité physique régulière, en cherchant à réduire son exposition aux toxiques et au stress, dans la mesure de ses ressources et de ses possibilités, on produit un contexte favorable à l’épanouissement de son organisme.]

    C'est beau la théorie :)
    Va expliquer ça à un vrai patient, tu sais, celui qui, alors qu'on vient de lui poser son stent au bloc après un infarct, descend tranquillement fumer sa clope en bas de l'hopital...

  14. Article Intéressant,

    J'aurais aimé savoir si cette stratégie d'apprentissage, de pédagogie est applicable à d'autres domaines ou est elle propre à la médecine ? As tu des auteurs référents concernant l'efficience dans le monde du travail en général par exemple?

  15. Raphaël Arditti a écrit:

    Krabin, je te serais reconnaissant d'adopter un ton différent à mon endroit. De mon côté, je ne pense pas avoir été méprisant ou arrogant, et bien que ton précédent message recelait d'importants vices de raisonnement, je suis resté poliment en retrait afin de te laisser développer ton argumentation.
    Je pense que si tu n'essayes pas de me considérer, au moins pour un temps, comme quelqu'un qui a un minimum réfléchi sur son sujet, notre échange concernant le fond de l'article ne pourra pleinement s'établir.

    Bonjour Nairod,
    je suis désolé, mais je n'ai pas d'auteurs précis à te livrer (hormis ceux déjà cités par Olivier + les articles de fond du blog). Pourrais-tu me donner des indications un peu plus précises quant au domaine qui t'intéresse ? Cela me permettra d'y réfléchir de mon côté et de te proposer une réponse détaillée :-)

    PS : pour clarifier concernant la barrière hémato-encéphalique : l'idée que je voulais faire passer, est qu'actuellement les chercheurs travaillent à forcer cette barrière (opposition frontale à l'occidentale), plutôt qu'à la contourner en empruntant d'autres chemins moins coûteux en énergie (approche systémique et efficiente). Pour ceux qui veulent en savoir plus ou tout simplement constater l'importance de cette question dans la recherche biomédicale : fr.wikipedia.org/wiki/Str...
    Olivier, peux-tu supprimer de l'article le passage suivant : "à coup de doses massives de médicaments", afin de dissiper tout malentendu ? :-)

  16. Salut,
    désolé que tu l'aies perçu comme ça, ça n'était pas mon intention. De quels vices de raisonnement parles-tu?

  17. Ah ! Voilà de futurs médecins qui s'interrogent d'une manière intelligente (en utilisant la philosophie pragmatique pour changer de paradigme et de regard). Bravo !

    Il y a de grandes choses à faire en rapprochant la médecine allopathique des médecines naturelles, holistiques, qui renferment un savoir souvent moqué, alors que de plus en plus de gens se tournent vers la naturopathie par exemple.

    En ce qui concerne la question des bactéries intestinales, c'est un terrain très important et encore quasiment vierge. En France, peu de gastro-entérologues connaissent la candidose ou le syndrome du côlon irritable, ainsi que le syndrome de l'intestin perméable, dont sont pourtant souffrants 10 à 20% de la population !

    Or, la pensée systémique n'est pas encore très appliquée en allopathie, ou l'enseignement à l'ancienne reste très linéaire. Très dogmatique aussi.

    Mais il y a des raisons à cela, malheureusement...

    Bref, continuez, sortez des sentiers battues et des autoroutes de la pensée qui ont été batties par d'autres.

  18. J’arrive après la bataille. :D
    Article intéressant à bien des égards et notamment pour le nombre de questions qu’il soulève. Je ne sais pas si nos précédents échanges t’ont apporté quelque chose mais j’ai plusieurs nouvelles questions à te poser Raphaël. Ce n’est pas un interrogatoire de police, sois rassuré ! ;)
    J’ai rédigé ce commentaire en lisant l’article et sans avoir lu les autres commentaires. Excusez-moi pour d’éventuelles redites.

    Commentaires sur la première partie.

    « ceux-ci cherchent avant tout à acquérir des compétences dans le but d’exercer un métier et donc un rôle dans la société. »

    Quelle est la finalité du métier de médecin ? Est-elle la même pour un chirurgien, un psychiatre ou un pharmacien ?
    Est-ce que le rôle du médecin dans la société est en rapport avec sa finalité ? Ou, tournée autrement, est-ce qu’il est dans la finalité du médecin d’avoir un rôle social ?

    « Plutôt que de viser une connaissance exhaustive du corps humain (anatomie, physiologie, embryologie etc.), elle doit travailler à sélectionner, dans les divers champs de savoirs constitués (sciences dures, sciences humaines), les informations à même de permettre une prise en charge globale du patient. «

    Quelles sont les sciences dures et sciences humaines auxquelles tu fais allusion ?
    N’est-ce pas plutôt la façon actuelle d’enseigner les matières médicales fondamentales (anatomie, physiologie, embryologie, histologie, pathologie, …) qui est à revoir ? L’apprentissage de l’anatomie a rétréci comme une peau de chagrin et toutes ces disciplines souffrent du diktat de la biologie moléculaire et de ses copines. Je parle bien sûr de l’influence du monde pharmaceutique sur le monde médical. De témoignage de médecins, l’évolution de cette influence a été fulgurante des années 50 à nos jours.
    Ne peut-on pas imaginer un apprentissage de l’anatomie, de la physiologie et de la pathologie qui se fasse de manière globale ? En appliquant par exemple les principes de la systémique et de la cybernétique au vivant ?

    « Enfin, à présent que nous sommes en possession d’un point de départ et d’un point d’arrivée (objectif) »

    Je suppose que tu es d’accord, le point d’arrivée va varier d’une spécialité à l’autre, la fonction d’un chirurgien n’étant pas la même que celle d’un médecin. Peux-tu nous donner ta vision idéale de la formation que tu décris théoriquement ? Au moins, le tronc commun à toutes les spécialités. Je ne suis pas médecin mais je veux bien te donner la mienne ensuite. ;)

    Commentaires sur la deuxième partie
    Alors d’emblée, quelle est ta définition de la maladie ?

    « La prise en compte des contextes psychologiques et sociologiques dans lesquels survient la maladie amène le médecin à reconsidérer profondément la prise en charge de ses patients, notamment en prêtant une attention soutenue à la communication qu’il peut entretenir avec eux. «

    Question épineuse, comment distinguer les maladies « somato-psychique » des maladies « psycho-somatiques » ? Comment savoir si l’état mental de tel patient est du à tel dérèglement biologique ou si tel dérèglement biologique est du à l’état mental du patient ?
    C’est l’une des problématiques fondamentales de Laborit (comique de répétition). ;p

    Dans ton texte, on voit que tu fais allusion aux maladies qui nécessitent une prise en charge psychologique des patients. Les pathologies dites lourdes, affections chroniques, maladies systémiques ou orphelines, cancers, etc… qui n’ont pas de traitement efficace connu et qui sont donc vécu sur le long terme par le patient.
    Est-ce que, s’il existait un traitement efficace à l’ensemble de ces pathologies, la prise en charge psychologique du patient serait la même par le médecin ?
    Est-ce que, s’il connaissait l’existence de ce traitement, le patient aurait la même attente auprès de son médecin ? Est-ce qu’il voudrait une prise en charge psychologique ou la résolution de son problème ?

    «Se réapproprier la maladie permet également au patient de consolider son identité, de l’unifier. Un tel événement peut être en effet très déstabilisant car il n’est pas facile d’être dans le déni perpétuel : les défaillances du corps se manifestent régulièrement à la conscience, non seulement par les symptômes, mais également par l’attitude des proches ainsi que par les structures de prise en charge (hôpitaux, cliniques, maisons de soin etc.). «

    J’aime bien cette partie. La dichotomie entre le corps et l’esprit est tellement prégnante dans notre culture occidentale, qu’amener le patient à comprendre que son « psychisme » peut être perturbé par un trouble organique et inversement relève du défi. Surtout à la vue du nombre de médecins qui font culpabiliser le patient plutôt que d’avouer leur impuissance à diagnostiquer et traiter un cas difficile : « C’est dans votre tête, monsieur ».
    La relation entre le malade, sa maladie incurable, son entourage familial et médical est une question passionnante qui est souvent abordé par l’école de Palo Alto (dans le domaine de la psychiatrie). On peut l’étendre à l’ensemble des affections longues sans remède efficace connu. Comment faire en sorte que le milieu direct du patient soit propice au renforcement de son mental et donc de son système immunitaire quand les a priori et les préjugés sur tel cancer vous donne 3 mois à vivre ?
    Cette interprétation aura forcément une influence sur le patient.


    « Mais on peut également, sur le plan purement biologique, s’appuyer sur les organes qui interagissent avec l’organe lésé afin de mieux le soigner. »


    Quelles sont les interactions possibles entre deux organes d’un point de vue scientifique/médical (par opposition aux conceptions énergétiques orientales) ?
    Il y aura l’interaction mécanique (compression médullaire), l’interaction chimique (reflux gatro-oesophagien), l’interaction nerveuse (névralgie, douleur projetée), l’interaction vasculaire (maladie de Raynaud, infarctus, phlébite), l’interaction hormonale (diabète, hyperthyroïdie) et l’interaction immunitaire (maladie auto-immune). Je n’en vois pas d’autre. Il faut aussi prendre en compte les interactions avec le milieu extérieur, c’est-à-dire, les interactions physiques (radiations, ondes,…), chimiques (alimentation, intoxication, …), mécaniques (traumatismes, micro-traumatismes,…) et informatives (pathologies comportementales). A mon humble avis, le rôle du médecin est d’abord d’identifier ces interactions intra- et extra-organiques avant d’envisager une prise en charge psychologique.
    Cette dernière serait à réserver aux pathologies de cause inconnue et cette prise en charge serait du domaine d’un thérapeute spécialisé. Ses fonctions seraient de créer le contexte idéal à la récupération du malade (changement d’alimentation, coaching personnalisé, repos, remise en question de la situation professionnelle ou familiale, etc…)

    « Il y a quelques mois, des chercheurs ont établis un lien entre l’activité de notre flore intestinale (1015 bactéries) et le fonctionnement de notre cerveau. On peut penser que cette découverte est potentiellement riche de promesses en ce qui concerne le traitement des pathologies cérébrales. En effet, le cerveau est un organe particulièrement bien isolé des vaisseaux sanguins, de par l’existence d’une barrière dite hémato-encéphalique. »

    Est-ce que tu peux nous donner la source de cet article stp ?

    « comment la prise en compte du contexte (système) nous permettait de mieux prendre en charge un dysfonctionnement qu’on pourrait à tort considérer comme purement localisé au plan biologique. »

    Puisque nous sommes des animaux sociaux et que le corps ne peut être séparé de l’esprit, le plan biologique n’englobe-t-il pas le plan psychologique et social ? C’est une des thèses fondamentales de Laborit (comique de répétition bis). ;p

    « Mais la prise en compte du contexte ne permet pas seulement de contourner plus aisément les obstacles (maladies) qui se dressent sur le chemin de la santé. »

    Quelle est ta définition de la santé Raphaël ?
    « On peut également l’utiliser afin de réduire fortement la probabilité d’apparition de tels obstacles : ainsi, en maîtrisant son alimentation, en pratiquant une activité physique régulière, en cherchant à réduire son exposition aux toxiques et au stress, dans la mesure de ses ressources et de ses possibilités, on produit un contexte favorable à l’épanouissement de son organisme. »

    Entièrement d’accord avec toi sur l’importance de la prévention.
    Si la diététique et la gestion du stress étaient des matières fondamentales dès l’école primaire, si l’activité physique ou même créative était plus présente du primaire au secondaire, si l’information était faite dans toutes les entreprises, imaginez dans quel monde merveilleux nous viverions ? Imaginez comme le trou de la sécu serait ridicule.
    C’est beau de rêver… =)

    En tout cas, j’espère que tu persisteras dans ton projet de réformer l’enseignement en médecine. Je te souhaite bon courage ! ;)

  19. Beaucoup de choses intéressantes dans les commentaires également.

    Je veux juste rebondir sur un concept qui revient souvent, l'opposition entre une vision "occidentale" analytique et une vision "orientale" plus globale.
    C'est pour moi une généralisation hâtive qui ne reflète pas la "réalité". D'accord, le courant principal de la science occidentale se base sur une approche analytique alors que les orientaux ont une vision holiste certaine mais il existe des penseurs de la pensée "globale" en Occident qui n'ont pas été ou peu influencé par les conceptions orientales.
    Ces penseurs étaient, selon moi, les précurseurs de ce qui allait devenir la future théorie des systèmes.

    A propos d'une éventuelle influence de l'holistique de la médecine chinoise sur l'analytique de la médecine occidentale, il ne faut pas perdre de vue qu'il y a une énorme différence de référentiel entre les deux. La médecine occidentale se base sur les sciences de l'observation et de l'expérimentation là où la médecine chinoise traditionnelle n'a pas ou peu de bases anatomiques et physiologiques et repose sur un empirisme quatre fois millénaire. La raison est historique, pendant de longues périodes, les dissections de corps étaient interdites aux médecins chinois. Les occidentaux ont bénéficié de plus de liberté dans ce domaine.

    La médecine chinoise fonctionne donc sur un modèle holistique énergétique et la médecine occidentale sur un modèle analytique matérialiste. Il y a donc un tel fossé entre les deux qu'appliquer l'holistique de la médecine chinoise à la médecine occidentale pose des problèmes de compatibilité.

    En revanche, appliquer la théorie des systèmes et la cybernétique aux disciplines fondamentales de la médecine occidentale ne pose aucun problème car le référentiel est commun. Avec de tels outils, il est possible de réfléchir sur les interactions d'un organe souffrant avec les organes qui peuvent le faire souffrir à distance sans invoquer des notions d'énergétique ou de vitalisme.

    Un bon témoin de cette évolution est la publication des traités de physiologie des années 60 à nos jours, il existe de plus en plus traités de physiologie écrit avec une approche systémique et cybernétique.
    Et pour finir sur une note d'humour, l'un d'entre eux a été écrit par Laborit (comique de répétition ter). ;p

  20. Raphaël Arditti a écrit:

    Bonjour,

    A Krabin : tous les éléments d'un contexte ne permettent pas forcément d'éclairer le sens d'un texte. Par exemple, savoir si je suis plutôt slip ou caleçon ne te permettra pas, a priori, de mieux cerner ma démarche. Ici, tu me demandes quel est mon niveau d'étude. Je pense que la question sous-jacente est de savoir quelle est ma connaissance du cursus médical. Or, on peut être en première année et parfaitement connaître le déroulement des études médicales, ainsi que les modalités d'exercice de la médecine, pour peu que l'on ait longuement discuté avec des étudiants et des médecins. Comme si tous les membres d'une même promotion avait le même bagage et la même vision du monde.
    Hormis le fait que cette information ne me semble pas pertinente pour critiquer mon texte, tu pourrais très facilement deviner dans quelles eaux je me trouve. A quel moment une réflexion de cette nature a des chances d'émerger et de se développer ?

    Concernant tes remarques, j'ai le sentiment que tu interprètes mon texte comme une critique de la médecine actuelle. Or, comme je l'explique dans l'introduction, mon but est de montrer comment on peut penser constructiviste en médecine. Que cela engendre un regard neuf sur les pratiques actuelles, c'est certain, mais il faut au préalable avoir compris comment s'articule les concepts de téléologie, de système et d'efficience. Je t'invite donc à laisser momentanément de côté ce que tu sais déjà, afin de pleinement rentrer dans la logique du texte. Bien sûr, n'hésite pas à me poser des questions si tu souhaites que je développe un point particulier.

  21. Raphaël Arditti a écrit:

    Bonjour Black-Sun,

    Je pense que les notions de santé et de maladie sont très liées à celles de liberté, de pouvoir et de conquête. Etre malade, c'est perdre en souplesse adaptative. C'est assister à la perte de territoires autrefois conquis et maîtrisés.
    Cette perte d'autonomie peut s'opérer soit par la réduction de notre stock de solutions (atteinte de la mémoire), soit par notre incapacité à les mettre en oeuvre, et va générer angoisse et abattement chez la personne. Ces émotions vont à leur tour altérées le fonctionnement corporel et ralentir la guérison.
    Ainsi, on peut considérer que soigner, comme enseigner, consiste à (re)donner aux gens le sentiment qu'ils ont du pouvoir.

  22. Raphaël Arditti a écrit:

    Merci à toi et à Gaëtan pour vos encouragements :-)


Express Yourself!